Mali-Russie : vers une coopération stratégique élargie autour du nucléaire civil et des ressources aurifères

Mali-Russie : vers une coopération stratégique élargie autour du nucléaire civil et des ressources aurifères

Dans un contexte de recomposition géopolitique et de repositionnement des alliances économiques, le Mali et la Russie intensifient leur partenariat bilatéral par la signature d’accords structurants. Centrés sur le nucléaire civil, les industries extractives et les infrastructures énergétiques, ces engagements traduisent une volonté mutuelle de consolider une coopération multidimensionnelle, à forte valeur stratégique.

Une convergence d’intérêts dans les secteurs clés de l’énergie et des ressources naturelles

Les autorités maliennes et russes ont récemment scellé une série d’accords commerciaux couvrant des domaines aussi divers que l’énergie, l’exploration géologique, la logistique, les ressources minières et même la coopération humanitaire. Ces conventions s’inscrivent dans une dynamique plus large de diversification des partenariats stratégiques du Mali, à un moment où le pays cherche à renforcer sa souveraineté économique et énergétique. La Fédération de Russie, quant à elle, confirme son ambition de renforcer son ancrage structurel sur le continent africain par des instruments de coopération civile et technologique.

Le nucléaire civil comme levier d’indépendance énergétique

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Au cœur de cette coopération renforcée, figure un projet emblématique : la construction potentielle d’une centrale nucléaire de faible puissance, portée par le géant public russe Rosatom, déjà actif dans plusieurs pays africains. Cette infrastructure vise à répondre aux besoins énergétiques croissants du Mali, dont l’accès à une énergie fiable et durable reste encore limité, notamment dans les zones rurales.

Ce projet s’inscrit dans un cadre de coopération énergétique élargi, incluant des initiatives solaires d’envergure, traduisant l’approche hybride adoptée par les deux partenaires. Pour Bamako, il s’agit de moderniser le mix énergétique national, de réduire la dépendance aux combustibles fossiles importés, et de bâtir une infrastructure énergétique structurante au service de la transformation industrielle.

Une raffinerie d’or pour capter la valeur ajoutée locale

Parallèlement, la construction d’une raffinerie d’or figure parmi les axes stratégiques des accords signés. Le Mali, troisième producteur d’or du continent, ambitionne de mieux contrôler la chaîne de valeur aurifère, en internalisant les processus de transformation jusqu’alors réalisés à l’étranger. Ce projet soutenu par la Russie s’inscrit dans une logique de valorisation du contenu local, de création d’emplois qualifiés et d’augmentation des recettes fiscales issues de l’exploitation minière.

En consolidant ses capacités industrielles en aval, le Mali espère renforcer sa position sur les marchés internationaux et sécuriser les revenus issus de cette ressource critique pour son économie. Ce développement répond également aux impératifs de bonne gouvernance extractive et de souveraineté minérale, dans un secteur souvent dominé par les opérateurs étrangers.

Une reconfiguration de la présence stratégique russe en Afrique de l’Ouest

Ces initiatives économiques s’inscrivent dans un contexte de redéploiement de la coopération russo-malienne, consécutif au retrait du groupe paramilitaire Wagner, qui assurait jusqu’alors une partie de l’assistance sécuritaire du pays. La Russie maintient néanmoins sa présence à travers d’autres structures, telles que le « Corps africain », qui assure la continuité de ses engagements sécuritaires.

Ce repositionnement témoigne d’une volonté de renforcer les canaux étatiques et institutionnels de la coopération, en privilégiant des partenariats durables, civils et productifs. Il marque un tournant dans la diplomatie économique russe sur le continent, désormais centrée sur la technologie, l’infrastructure énergétique et les ressources extractives, au détriment d’une présence essentiellement militaire.

Une coopération à fort potentiel de transformation structurelle

La signature de ces accords ouvre la voie à une coopération plus intégrée et stratégique entre Bamako et Moscou. Pour le Mali, il s’agit de tirer parti de l’expertise technique et du capital russe pour accélérer l’industrialisation, diversifier l’économie et renforcer les capacités nationales dans des secteurs clés. Pour la Russie, ces accords représentent un instrument de soft power économique, lui permettant de s’imposer comme un acteur de premier plan dans la transition énergétique africaine.

Ces développements méritent d’être suivis avec attention, tant ils pourraient préfigurer un nouveau modèle de partenariat extractif fondé sur la souveraineté, la valorisation locale des ressources et l’innovation technologique. À condition que la mise en œuvre des projets respecte les principes de durabilité environnementale, de transparence dans la gouvernance et d’inclusivité au bénéfice des populations locales, ce tournant pourrait inaugurer une nouvelle ère dans la coopération russo-africaine en matière de ressources naturelles.

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